La menace de la fièvre Ebola qui sévit depuis le début de l’année 2014 en Afrique de l'Ouest, a amené la Côte d’Ivoire, à fermer ses frontières terrestres avec la Guinée et le Liberia, deux pays voisins touchés par l’épidémie. Depuis lors, entre refoulements et mise en quarantaine de ressortissants de ces pays, la Côte d’Ivoire qui n’a jusque-là enregistré aucun cas d’Ebola, est à l’épreuve de la cohésion intracommunautaire et la libre circulation dans l’espace CEDEAO : comment rester rigoureux dans la veille et le contrôle sans toutefois entacher les relations et la bonne cohabitation entre les Ivoiriens et leurs "frères" de la sous-région ? Enquête.
" Citoyens, le droit que la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) vous accorde ne peut être limité que pour des raisons d’ordre public, de sécurité ou de santé invoquées par l’Etat membre d’accueil. La décision de refus de renouvellement de votre carte de séjour ou la décision de vous reconduire à la frontière doit reposer sur une menace très grave pour l’Etat membre d’accueil", stipule le protocole sur la libre circulation des personnes, le droit de résidence et le droit d’établissement de cette organisation régionale. Face à la menace du virus Ebola qui sévit dans certains pays d’Afrique de l’Ouest dont des voisins de la Côte d’Ivoire, le gouvernement ivoirien a élevé son niveau d’alerte et initié des activités de préparation et de réponse contre l’épidémie. L’une des mesures les plus importantes, la fermeture, depuis le 22 août 2014, de ses frontières terrestres avec la Guinée et le Libéria.
Sipilou, petite ville du Nord-ouest ivoirien à la frontière avec la Guinée, situé à 681 km d’Abidjan, est bien calme ce lundi 17 novembre. Au poste frontalier 2, sur la voie menant à Dirita, premier village côté guinéen, des agents de contrôle de l’Institut national d’hygiène(INHP), de la Douane, ainsi que des militaires et des gendarmes ivoiriens sont présents. Assis calmement, ils scrutent l’horizon, les yeux rivés vers la Guinée. Vigilance oblige compte tenue de la fermeture de la frontière. Nonobstant, des migrants arrivent à pénétrer le territoire ivoirien en empruntant des pistes ou voies détournées.
Sipilou et la vigilance contre les « infiltrations »
« Nous faisons de la surveillance. Au début de la fermeture de la frontière, on comptait les entrées et sorties des paysans, mais depuis le mardi 11 novembre, nous avons reçu l’instruction d’arrêter de compter », affirme Kouhon Yvan, agent de l’INHP, assis à côté de sa collègue Kotchi Mélène.
Avant l’arrêt des décomptes, ces deux personnes enregistraient chaque jour, tôt le matin, le départ des paysans de Sipilou ayant leurs champs dans les environs du poste frontalier. Ils notaient le nombre d’hommes, de femmes et d’enfants qui allaient au champ, passant par le poste, et vérifiaient la liste le soir à leur retour, explique l’un d’entre eux.
" Dès qu’une personne qui n’était pas inscrite sur la liste du matin se signalait à l’entrée du poste frontalier le soir, il était interpellé, interrogé et refoulé s’il s’avérait qu’il est Guinéen ", font-ils savoir, précisant que certains habitants exploitent des terres au-delà de la frontière.
Bâtiment encore inachevé, le poste frontalier de Sipilou 2, est situé à quelque 800 m de la frontière ivoiro-guinéenne (matérialisée par une petite rivière) et à quelque trois kilomètres de Dirita, en guinée. Le deuxième poste, Sipilou 3, à un autre bout de la ville, mène à Piné, un autre village guinéen situé à environ huit kilomètres de Sipilou.
Au niveau du poste douanier de Sipilou 2, l’élève sous-officier Cissé Alpha, participe également au travail d’observation et de "vigilance contre les infiltrations". " Dans le cas où des personnes viennent de la Guinée à moto ou à pied, nous les faisons retourner", dit-il. Une assertion soutenue par le lieutenant Soro Siaka des Forces républicaines de Côte d’Ivoire en poste à Sipilou, dont les éléments, au delà de leur rôle d’assurer la sécurité, prêtent aussi main forte à leurs frères d’armes de la gendarmerie et de la douane dans le cadre de la lutte contre Ebola.
" Lors de contrôles banals, quand on tombe sur des infiltrés, on les met à la disposition de la gendarmerie qui se charge de les convoyer vers la frontière ", explique le lieutenant Soro. Mais avec l’absence totale d’ONG dans ce département large de quelque 1200 km2, l’on est tenté de s’interroger si ces convoiements se font dans le respect de la dignité et des droits humains. A cette préoccupation le lieutenant se veut peu bavard : " L’armée ne peut que convoyer militairement des personnes qui s’infiltrent en Côte d’Ivoire. Comme l’homme n’est pas parfait à 100%, il peut y avoir des frustrations et des défaillances ", affirme-t-il.
La gendarmerie, de son côté, se fait simplement la "grande muette". Pas d’échange avec des journalistes sans autorisation de la hiérarchie.
Selon le sous-préfet de Sipilou, Massouma Méité, le dernier refoulement en date (au jour du 17 novembre) remonte au 13 novembre, où neuf ressortissants guinéens dont trois enfants ont été ramenés au poste de Dirita, pour « documents sanitaires non conformes ». Un traitement souvent considéré comme une humiliation par les ressortissants de pays voisins, qui ne va pas sans engendrer de la frustration, installant une situation de gêne de part et d’autre.
Des interpellations fréquentes qui agacent de part et d’autre
Selon des habitants de Sipilou, des voyageurs en provenance de la Guinée voisine, qui empruntent des voies détournées pour accéder au territoire ivoirien sont régulièrement refoulés. Une situation jugée "agaçante" qui amène des membres du Comité de veille mis en place par les autorités locales, dans le cadre des mesures gouvernementales de lutte contre Ebola, à s’interroger s’il ne serait pas temps d’ouvrir les couloirs humanitaires et économiques à Sipilou, " en prenant soin de renforcer le plateau technique du centre sanitaire urbain de la ville et le dispositif de contrôle au niveau des postes frontaliers ". En effet, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) avait recommandé cette alternative pour faire face à la nécessité de permettre la circulation des biens et des personnes aux frontières. Une suggestion à laquelle le gouvernement ivoirien a marqué son adhésion : " il convient de souligner que cette mesure (de fermeture des frontières) s’accompagne de la mise en place de couloirs humanitaires, sanitaires et économiques, mesures adoptées et validées par la CEDEAO lors de la réunion des ministres de la Santé qui s’est tenue le 28 août 2014 à Accra", faisait observer le Premier ministre Daniel Kablan Duncan, lors d’une réunion du Comité national de veille pour la lutte contre l’épidémie de la maladie à virus Ebola, le 11 septembre 2014 à Abidjan. Des couloirs humanitaires qu’attend Sipilou pour mettre un terme à ces infiltrations qui créent de plus en plus la psychose au sein des populations. Mais surtout, qui, selon un habitant de la ville frontalière, " feront en sorte que nos frères de la CEDEAO ne chercheront plus à passer par des pistes pour venir chez nous. Ils emprunteront la voie officielle, de sorte que s’il s’avère qu’il y’a un cas suspect, le dispositif mis en place le prendra en charge".
De l’autre côté, les militaires guinéens basés à Dirita ne cachent plus leur irritation face à cette situation. Excédés par les rapatriements récurrents de leurs compatriotes par les gendarmes ivoiriens ils ont fini par interdire à leurs confrères ivoiriens, l’accès à leur poste, distant de quelque trois kilomètres de celui Sipilou 2. " Ils ont recommandé à nos gendarmes de faire leur travail de refoulement sans pour autant s’approcher du poste de Dirita, où ils sont désormais indésirables ", confie un agent de l’administration publique locale.
Pour éviter d’éventuelles frictions entre les deux armées qui pourraient être sources d’incidents diplomatiques, les personnes interceptées sont conduites par les gendarmes ivoiriens, juste au niveau de la frontière, sans être remises aux autorités guinéennes. Des scènes qui restent le lot quotidien des forces de l’ordre ivoiriennes en poste dans ce lieu durant cette période de "veille maximale". Mais Sipilou, qui ne veut pas se laisser surprendre par une éventuelle réouverture des frontières, anticipe sur les choses par le renforcement de son dispositif de riposte.
Sipilou et son dispositif de prévention
Le Dr Krouwa Christian du centre sanitaire urbain de Sipilou s’attèle à manipuler l’unique thermomètre à infrarouge en forme de pistolet que vient d’acquérir l’établissement pour le contrôle de la température à distance des patients. Ce thermomètre permet à quelque centimètres du patient de connaître sa température et de savoir s’il est fiévreux ou pas.
Dans le département, on s’évertue à faire respecter les consignes gouvernementales de prévention contre Ebola. Notamment se laver régulièrement les mains à l’eau et au savon, éviter de se serrer les mains, de se faire des accolades, et de manger la viande de brousse. Car le virus Ebola vit et se transmet par les liquides corporels notamment le sang, les selles, l’urine, la sueur, les larmes, le lait maternel, les sécrétions muqueuses et le sperme.
On sensibilise également sur les symptômes de la maladie : brusque fièvre, grande fatigue, diarrhée, vomissements, maux de tête, toux, saignement. Le message est passé régulièrement en langues locales aux populations, et des affiches de renseignements sont collées au sein des administrations et sur des murs de la ville.
Depuis plus de trois mois, souligne Dr Krouwa, le centre de santé dispose d’un site de traitement, capable d’accueillir 16 personnes.
Le manque de toilettes mobiles au dispositif n’empêche pas Dr Krouwa et son équipe comprenant deux infirmiers, une sage femme et un agent d’hygiène, de répéter tous les 10 jours les exercices de simulation de prise en charge de cas suspect, pour affiner leur reflexe en cas de besoin.
Pour l’heure, le centre dispose de 10 équipements de protection individuelle contre Ebola. "En cas de besoin nous pourront recevoir des équipements venant du district sanitaire de Man", assure le médecin.
Même s’il n’existe pas spécifiquement de médicament qui soigne officiellement la maladie d’Ebola, le centre sanitaire est suffisamment équipé en produits permettant de soigner des symptômes, fait savoir Dr Krouwa. "On peut arrêter la fièvre, la diarrhée, la fatigue, les vomissements, les saignements et d’autres malaises causés par le virus Ebola", dit-il. Ce traitement peut même se solder par la guérison du patient, lorsque ce dernier est pris en charge de façon précoce, comme cela a pu être observé ailleurs dans le monde, assure le praticien. Une lueur d’espoir, face à ce mal dont la première apparition remonte à près de 40 ans.
Retour sur les origines d’un mal
Le virus Ebola a été découvert pour la première fois en 1976 dans le nord de la République démocratique du Congo, alors appelé Zaïre. Le premier cas a été identifié par le médecin belge Peter Piot, de l'Institut de médecine tropicale d'Anvers. Dans le contexte actuel, le patient zéro qui a entrainé l’épidémie d’Ebola en 2014, serait un enfant décédé en décembre 2013 près de Gueckédou dans le Sud de la Guinée, selon l’OMS. La maladie s’est ensuite étendue au Liberia, en Sierra Leone et dans une moindre mesure, des pays récemment touchés comme le Mali.
Fin novembre 2014, l'OMS annonçait quelque 15 000 cas pour plus de 5 000 décès, dont plus de la moitié au Liberia, avant de signaler début décembre que l’on tend vers 7000 morts. Autant de données inquiétantes, qui permettent de saisir les enjeux de la décision des autorités ivoiriennes de fermer leurs frontières terrestres avec les pays touchés par l’épidémie. A leur corps défendant, puisque bien averties des incidences négatives de cette mesure sur l’essor économique et social des localités frontalières dont Sipilou.
Les activités économiques en berne à Sipilou
A la gare de Sipilou, la carte d’identité est désormais exigée avant tout achat de ticket de voyage depuis la fermeture des frontières. La société MT Transport, seule compagnie de transport qui relie Sipilou à Abidjan, effectuait une recette de 800 000 FCFA par jour en raison de quatre voyages, avant la fermeture des frontières. Elle transportait des guinéens venant en Côte d’Ivoire, notamment pour des voyages d’affaires, des cérémonies de mariage et autres activités. Depuis lors, il est difficile pour l’entreprise d’atteindre 100 000 voire 50 000 FCFA de recette par jour, selon un des ses responsables
Chez les femmes, principalement vendeuses de vivriers, le constat est le même. Car leurs voisins d’à côté qui prisent la banane plantain, le tarot, l’igname ne peuvent plus répondre au rendez-vous commercial. "Maintenant notre marché est vide. Avant, les Guinéens venaient nombreux s’approvisionner ici en vivres", regrette un convoyeur d’autocar. Ainsi va la vie à Sipilou, naguère "grenier" d’une bonne partie du Nord-est guinéen. Mais malgré ces effets collatéraux d’Ebola, dont l’impact se ressent également de l’autre côté de la frontière, on continue d’entretenir de bon rapports avec les frères de la CEDEAO résidents dans la localité. Tout comme partout en Côte d’Ivoire. Quoique cela ne se passe pas sans couacs par moments.
Une cohabitation fraternelle malgré des incidents récurrents
A Abidjan comme dans plusieurs localités du pays, entre suspicions et délations, méfiances et accusations, la cohabitation entre ivoiriens et ressortissants des pays touchés par cette maladie ravageuse, est souvent, par endroits, marquée par des incidents : des cas alertes et cas suspects signalés ça et là, mais chaque fois démentis par les tests de l’Institut Pasteur, des mises en quarantaine de temps en temps. Un aide-soignant guinéen soupçonné d’être une personne contact avec un patient mort d’Ebola dans son pays, fin octobre, qui reste introuvable après s’être rendu sur le territoire ivoirien a suscité crainte et psychose au sein des populations. Des sujets très souvent entretenus par des rumeurs de toutes formes, qui circulent par messages via les téléphones portables et les réseaux sociaux. Toutefois ces faits restent isolés et n’entachent en rien la bonne entente entre les Ivoiriens et leurs "frères" des pays touchés.
En effet, en dépit du phénomène Ebola, les ressortissants de la Guinée, du Libéria, de la Sierra Leone et du Mali vaquent tranquillement à leurs occupations à Abidjan comme dans les autres villes du pays sans être inquiétés. La cohabitation reste fraternelle et sans heurts majeurs.
El Hadj Sékou Kaba, 67 ans, est le président du conseil des Guinéens résidant en Côte d’Ivoire. Marié à une ivoirienne et résident à Abidjan, il soutient que les relations "restent au beau fixe entre Ivoiriens et Guinéens", mais souhaite que les leaders des communautés CEDEAO soient plus impliqués par les autorités ivoiriennes dans les campagnes de sensibilisation contre Ebola.
"Nous participons à la sensibilisation sur les mesures préventives contre Ebola en collectant des fonds au sein de cette diaspora guinéenne forte de plus d’un million de membres, pour faire des passages à la télé, organiser des activités sportives entre ressortissants de la CEDEAO, et faire des dons de matériels préventifs contre Ebola, pour que notre pays d’accueil n’enregistre pas de cas de cette maladie", affirme-t-il. M. Kaba souhaite que l’Etat de Côte d’Ivoire responsabilise davantage les ressortissants des pays touchés, et les intègre dans sa stratégie de prévention et de lutte contre Ebola, afin qu’ils ne se sentent pas "isolés dans cette lutte".
De son côté, le chef de la communauté libérienne, Alexander Watson, architecte vivant en Côte d’Ivoire depuis 18 ans, assure que "malgré Ebola, la fraternité demeure entre libériens et ivoiriens". Toutefois, "durant les premiers moments de la période de fermeture de la frontière entre nos deux pays, j’ai été informé que des libériens qui ont tenté de s’introduire en Côte d’Ivoire par des voies détournées ont été rattrapés et reconduits vers le Liberia", raconte-t-il. A Tabou et San Pedro (Sud-ouest, région de San-Pedro), ajoute M. Watson, certains de ses compatriotes ont eu quelques "accrochages" en août avec des jeunes ivoiriens qui les soupçonnaient, à cause de leur accent anglophone, de s’être infiltrés en Côte d’Ivoire. "Mais avec la sensibilisation et les échanges, les choses sont rentrées dans l’ordre. Les gens ne se méfient plus trop des libériens qui vivent vers les zones frontalières de la Côte d’Ivoire tout comme à Abidjan", dit-il.
"Nous comprenons que les autorités ivoiriennes prennent des mesures rigoureuses pour protéger leurs populations. Nous voulons les aider à bâtir ce pays, à le protéger contre la pandémie", professe Alexander Watson.
A Sipilou également, la proximité avec la Guinée ne constitue guère un mobile de conflits entre ivoiriens et étrangers. "Nous n’avons pas de problème avec les guinéens qui vivaient déjà ici avec nous avant l’arrivée d’Ebola dans leur pays, on vit ensemble sans palabre", affirme un habitant de la ville, avant d’ajouter : "on a parlé à tous nos frères de la CEDEAO, pour ne pas qu’ils cachent des personnes infiltrées chez eux et ils nous ont compris".
De la petite gare au centre-ville, on rencontre des personnes de plusieurs nationalités, essentiellement ouest-africaines. Guinéens, Maliens, Togolais, Béninois, Ghanéens, Burkinabé, Sénégalais, exerçant en toute quiétude diverses activités : restauration, petits commerces, vente de friperies. Ils circulent, travaillent et vivent sans soucis, dans le respect strict des mesures prises par leur pays d’accueil dans le cadre de la lutte contre Ebola. Des mesures qui se renforcent au fil des jours sans préjudices sur les droits des citoyens de tout pays, comme on le constate à l’aéroport international Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan.
Contrôle pointu à l’aéroport d’Abidjan
Dans ce hub, les vols en provenance des pays atteints d’Ebola vers l’aéroport international d’Abidjan (AERIA), qui avaient été suspendus le 10 août, ont repris le 20 octobre avec un premier vol en provenance de la Conakry (Guinée). Une décision qui, bien que saluée par les pays concernés, est accompagnée d’un dispositif de contrôle spécial pour les voyageurs entrant et en transit.
Au départ d’Abidjan, seule la compagnie Emirates des Emirats arabes unis procède au contrôle de température par des agents de la sureté avec des thermomètres à infrarouge.
A l’arrivée, les passagers en provenance de pays étrangers se dirigent du côté de l’aérogare, surnommée pour la circonstance aérogare INHP. Ils procèdent alors au lavage des mains à l’eau et au savon, déposent les fiches de renseignements qu’ils ont reçu durant le voyage, se soumettent à la prise de température par des thermomètres à infrarouge, des cameras thermiques. Quelques échanges avec des agents de l’INHP, et ils sont libérés.
Mais au cas où un voyageur fait une température d’au moins 38 degrés, il est retenu pour un questionnement approfondi dans une salle compartimentée en quatre salles d’observation. A cet effet, l’AERIA a prévu au niveau de l’aérogare sud où s’effectuent les vols domestiques, un local "pandémie" qui sert de site d’isolement des cas suspects d’Ebola. Un renforcement du dispositif de contrôle qui repositionne le pays dans son rôle de pays d’accueil et d’hospitalité. Pis, dans un élan de solidarité, la Côte d’Ivoire a apporté une contribution de 500 millions de FCFA pour soutenir les pays touchés par la maladie lors d’une réunion de l’Union africaine le 8 septembre 2014 à Addis-Abeba, en Ethiopie.
Le pays n’enregistre pour l’heure aucun cas d’Ebola grâce à sa stratégie de lutte qui, au-delà des seuls Ivoiriens, met en confiance les communautés étrangères qui y vivent dans l’harmonie avec leurs "tuteurs", même si Ebola représente à ce jour une "urgence de santé publique de portée mondiale ".
La Côte d’Ivoire a mis en place une stratégie de lutte contre la pandémie en menant des actions d’information, de sensibilisation dès le 23 mars 2014, en procédant à la mise en place des postes avancés aux frontières, au renforcement de la surveillances épidémiologique et à la formation de tous les agents de santé dans les 82 districts sanitaires du pays. A côté de ce dispositif qui intègre l’Institut Pasteur pour la vérification des prélèvements de sang, ont été installés des sites d’isolements et de traitement d’Ebola comme celui du CHU de Yopougou. Mais aussi la mise en place d’un dispositif de contrôle au niveau des ports d’Abidjan et de San-Pedro. "Une vingtaine de sites de traitement sont prévus sur le territoire national", annonce le chef de services de surveillance épidémiologique du CHU de Treichville", Dr Coulibaly Daouda. De quoi satisfaire l’Organisation ouest africaine de la santé (OOAS)
dont le directeur général adjoint Dr Laurent Assogba n’a pas hésité à laisser entendre, fin octobre, que la Côte d’Ivoire "est vraiment prête pour faire face à d’éventuels cas d’Ebola".
Toutefois l’OOAS estime que des améliorations doivent être apportées à ce système de riposte contre l’Ebola, qui devrait selon elle intégrer une prise en charge des passagers dans les grandes gares routières, ainsi que la prise de mesures adéquates pour rendre l’Institut Pasteur d’Abidjan plus performant.
Dans cette lutte à objectif " Zéro Ebola en Côte d’Ivoire", le pays n’est pas seul dans sa volonté de protéger ses populations –Ivoiriens et immigrés y compris. Il sait compter sur l’appui de ses amis, notamment la France. A travers le Contrat de désendettement et de développement, la France et la Côte d’Ivoire ont conclu, fin octobre 2014, la "convention d’affectation du programme Ebola" d’un montant de six milliards de francs CFA. Elle est destinée au financement du plan de prévention et de lutte contre cette maladie en Côte d’Ivoire.
Mais également, la Chine, de son côté, et dans la même période, a fait don de matériels d’une valeur de 410 millions de FCFA comprenant notamment des habits de protection, masques à gaz, paires de gants en caoutchouc jetables, chaussures de protection, pulvérisateurs, lunettes de protection, thermomètres à infrarouge, ensembles de détecteurs de température corporelle, plastiques corporels. Des acquisitions qui permettent d’apporter plus de sérénité dans la cohabitation entre ivoiriens et étrangers, en particulier les ressortissants des pays touchés par Ebola.
Quant à l’avenir, les humanitaires sont plus que jamais optimistes que l’humanité finira par gagner le combat contre cette maladie en trouvant le vaccin et les sérums appropriés pour permettre la circulation sereine des populations du monde. Y compris celles de l’espace CEDEAO aux 15 000 km de frontières communes entre ses 15 Etats membres. Autant s’accorder avec Dr Krouwa Christian du centre sanitaire urbain de Sipilou, selon lequel : "Ebola n’est pas une fatalité."