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PROSTITUTION ET FICHIER SANITAIRE : Vivre dans la clandestinité ou avec le risque d’être marquée à vie

On le désigne comme le plus vieux au monde, mais on ne sort pas de la prostitution aussi aisément qu’on pourrait y entrer. Une fois inscrite au fichier sanitaire on reste marqué à vie. Le statut de professionnelle du sexe on risque de continuer à le porter même si on tourne le dos aux trottoirs pour cesser de «vivre avec la nuit». La seule porte de salut reste la clandestinité. Avec les risques et périls qui vont avec.

 
A Malika, dans la banlieue dakaroise, Kiné est bien connue comme professionnelle du sexe. Son statut de « clandestin », pour ceux qui l’ignoraient dans le quartier, a sauté . Elle constitue un exemple typiquele 27 septembre 2017. dans une affaire qui l’avait opposée à un homme qui, selon les informations relayéesUne altercation l’avait opposée à un homme qui, avait refusé de payer le prix de la «passe» et le scandale avait ameuté la foule. Son histoire est simple mais dramatique. «Je suis divorcée. Mon ex-mari  avec un homme qui m’a abandonné avec plus de 5 enfants majeurs que je dois nourrir e. Et le besoin d’argent m’a fait tourner vers la prostitution. Je n’avais aucune autre source de revenus à part ce qui se trouve entre mes deux jambes possible. Je travaille dans la clandestinité. C’est difficile parce que je ne peux aller dans aucune structures de santé pour me faire consulter ou pour chercher une carte sanitaire. Car j Je ne veux pas rencontrer des personnes qui me reconnaitraiessent», a-t-elle confie-t-elleé.

 

Kiné a eu de la chance.

 

Si Kiné a eu la chance de n’être pas traduite devant la justice,Son altercation n’a pas conduit à une intervention de la police et à un déferrement devant le tribunal . A Dakar, bien des fois des femmes sont traduites devant les barreaux pour «non inscription au fichier sanitaire et social» (Nifss). C’est le cas de la plupart des femmes qui, ce mardi 26 août 2017, trainent leur peine à la barre du tribunal hors classe de Dakar. Toutes des «clandos». Les histoires se succèdent et se ressemblent presque. Faites de dénis. son elle diUne dame qui se s’apitoie devant le juge soutient avoir «croisé des policiers qui effectuaient une ronde dans les environs de l’avenue Bourguiba, tard dans la nuit». Elle prenait l’air. Raflée, elle s’est retrouvée là. Elle partira du tribunal libre, la preuve qu’elle faisait du racolage n’ayant pas été apportéenon plus, puis. Vrai ou faux, l’opprobre lui restera.

C’est dire que lesLes affaires de non inscription au fichier sanitaire et social sont monnaies courantes dans les rôles d’audience, du fait de l’ambiguïté de cette la loi portant sur la prostitution. Ce qui fait qu’aAu Palais de justice de Dakar, les personnes jugées sont de tout âge. Elles sont parfois d’étudiantes, de travailleuses domestiques et même deou… femmes mariées.

 

‘’ ‘’Si je prends un carnet, demain mes enfants … ‘’

 

Enquêter dans le milieu de la prostitution clandestine relève d’un parcours dans des culs-de-sac.  On se heurte à l’omerta jusqu’à ce que la barrière du manque de confiance saute. Ce qui n’est pas une évidence. Au sein d’une organisation qui accompagne les travailleuses de sexe pour les orienter vers des activités génératrices de revenus, une responsable confie :

«L’un de ces facteurs qui expliquent pourquoi certaines d’entre nous s’abstiennent encore de s’inscrire est, à mon avis, leBeaucoup de clandestins restent dans l’illégalité parce qu’elles ont peur de voir leur dignité bafouée). Nous subissons beaucoup de violations de droits humains. Celles qui agissent dans la clandestinité et qui refusent d’aller s’inscrire dans les fichiers sanitaires, nous lesParce qu’il y a des problèmes qui découlent de ces inscriptions au fichier sanitaire et social. L’un de ces problèmes est qu’on ignoreElles ont peur de se faire inscrire comme professionnelles du sexe parce qu’la personne inscrite. Uune fois qu’elles auronta quitté le milieu, e, les informations sur leurs parcours professionnels vont rester. Elles n’ont aucune garantie concernant la destination finale de ce fichier, une fois la page tournée», indique-t-elle. Cette crainte enfonce nombre de Ps dans la clandestinité. L’une des confie : «On a peur de l’avenir. Imaginez qu’un enfant devienne demain quelqu’un et découvre que dans le passé sa maman, a été une Ps…». «Devant les obstacles qui rendent difficile le retrait du fichier sanitaire elles préfèrent donc ainsi rester dans l’ombre et travailler dans la clandestinité», a-t-elle soutenusoutient l’accompagnatrice.

Fruit de l’absence de radiation dudit fichier,

Cette clandestinité constitue reste une menace pour la santé publique. Il est ainsi ‘’un grand facteur de. Mal suivie, mal protégée, elles courent des risques de contamination par le virus du Vih et autres maladies sexuellement transmissibles. A côté d’une prévalence nationale de 0,7%, le milieu des Ps affiche par contre un taux de 18,5 %. Il s’agit d’une des communautés les plus touchées à côté des hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes, chez qui la prévalence atteint 21,8%. Dans le monde de la lutte contre le sida, c’est d’ailleurs une communauté qui attire une grande attention pour voir comment l’encadrer, faciliter son accès aux soins dans un pays marqué par une homophobie qui pousse les homosexuels à vivre dans un monde presque fermé.

Le monde de la prostitution clandestine n’est pas plus ouvert. ’’, a-t-elle indiqué. Dans notre série d’interrogation, la parole a été donnée à Mme A., la quarantaine révolue, elle est de ces défenseurs des Ps, r‘’Régulièrement inscrite, elle dit comme Ps, ne cache pas son inquiétude que le dossier des «clandestins» face àrevient sur la table. «’C’est parce qu’eElles n’ont pas accès aux structures de santé et , qu’elles constituent un danger pour tout le monde. Pour elles-mêmes, pour les clients, pour nous toutes. Certaines qui sont très jeunes,. Nous voyons des Ps de 13 ans. Parce que les femmes sont vulnérables. La plupart d’entre elles n’ont rien et ont deun faibles niveaux d’études. Ce qui fait que certaines sont obligées de se taper de petits boulots. Ces activités génératrices de revenus ne leur permettant pas de satisfaire leurs besoins, ces filles, pour survivre, s’adonnent à la prostitution. Les rares Ps que je connais sont dans le milieu à cause de problèmes financiers dont ils sont confrontés. Ce sont des femmes Iissues  de familles démunies, elles sont déjà  et qui constituent des soutiens de familles C’est donc par manque de solutions qu’elles s’adonnent à cette pratique», soutient-elle. Clandestine parce qu’elles ne veulent pas connaisse leur statut. Mais clandestine aussi à cause de leurs données personnelles qui se retrouvent des des fichiers dont elles ne savent pas à quoi cela peut servir. Mme F.,  une des responsables de structure en charge des  ces Ps,, a pense que sa part la facilitation de la suppression des données de concernant toute personne qui décide de quitter le milieu de la prostitution est une voie de salut. «’Nous estimons qu’ilIl est urgent en charge de la sécurité et de la santé des populations de faire le nécessaire pour que les fichiers sanitaires soient gérés avec beaucoup plus de rigueur. Nous pensons même que l’on doit aller vers la suppression au niveau des fichiers sanitaires, de toutes les données personnelles de ceux qui ont quitté le milieud’en arriver à cette décision. C’est une affaire dignité humaine», confie-telle, recommande la dame.

Il faut rappeler que la situation des acteurs de la prostitution a toujours été une préoccupation majeure pour les autorités chargées de la santé publique. A preuve,.

Ddans le souci d’améliorer le cadre juridique au Sénégal comme pour, entre autres,et réformer la loi qui régit la pratique de la prostitution, l’Ong internationale Africa consultants international (Aci) avaitit été saisie par le Réseau des parlementaires en matière de population et développement pour une étude avait, par la suite, été. Celle-ci avait mis en exergue le caractère ambigu, voire obsolète et inapproprié des textes qui réglementent la prostitution au Sénégal. «Ce caractère a été reconnu par les acteurs, à tous les niveaux. Que ce soit  comme, entre autres, les professionnels du sexee le plus souvent appelées prostitués ,ou les homosexuels hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes, ; les forces de l’ordre, ; les agents de santé, ; les travailleurs sociaux, ; les chercheurs. Un Le document, intitulé Ll’ambiguïté des textes sur la prostitution au Sénégal soulevait, à ce propos, l’urgence et la nécessité pour l’Etat de mettre en place des politiques de prévention de la prostitution et de réinsertion des professionnels du sexe, mais aussi de veille à une révision de l’ensemble des textes en vigueur», souligne un technicien de Aci.

 

La révision des textes qui régissent la prostitution réclamée

 

Un tel fait, selon les acteurs, contribuerait, entre autres, à  réduire le nombre de professionnels du sexe agissant ou non dans la clandestinité. S’estimant alors victimes de discrimination et de stigmatisations, les Ps continuent de réclamer des pouvoirs publics, la révision des textes qui régissent la prostitution. Dans cette même étude, il a été souligné quelques contraintes liées au milieu de la prostitution. Il s’agit, entre autres, de Par ailleurs, l’étude juge inapproprié l’état actuel des textes avec  jugé inappropriés et archaïques, l’interdiction aux personnes de moins de 21 ans d’accéder au carnet sanitaire, alors que la prostitution commence parfois dès l’âge de 13 ans., mais aussi, la non-possibilité de procéder à la radiation du fichier sanitaire et social.

La voie pour sortir de la prostitution est balisée. En sortir suppose la rédaction d’une déclaration demande écrite et signée ; adresséeer la demande au médecin responsable du centre des i Ist (Infections sexuellement transmissibles, expliquant les raisons de sa demande de radiation) . Et selon les dispositions, si la Ps change de domicile ou de résidence, elle doit informer le centre. A charge alors au médecinS’en suit une visite complète clinique et biologique pour déceler toute infection sexeuelle curable, Le cas échéant, la demandeuse est soumise à un traitement. Et c’est seulement à la fin du traitement et après quequand le médecin aiurat certifié qu’elle est indemne de toute maladie vénérienne contagieuse, que la Ps pourra obtenir sa radiation.

Et c’est à l’issu du processus, que le professionnel du sexe qui s’est engagé à quitter le milieu de la prostitution se fera délivré, par l’assistante sociale, un certificat de radiation en trois exemplaires : Un pour le dossier, un pour celle qui demande et un pour la police. À partir de ce moment-là, celle-ci n’est plus inscrite au fichier. Le carnet sanitaire lui est retiré. Cependant, possibilité est toujours offerte au professionnel du sexe de s’inscrire à nouveau après radiation.

 

‘’Quand saisir le juge pour d'obtenir de l'administration la radiation’’

 

Vu l’équation que constitue cette question pour les acteurs du milieu de la prostitution, invite a été faite àAvocat à la Cour, Me Bamba Cissé, avocat à la cours, de parler de la prostitution et de la radiation des Ps du fichier. Intervenant, il a citeé l’article 6 de la loi n° 66-21 du 1er février 1966 relative à la prostitution qui .  Ledit article dispose : ‘’Tque «toute personne qui désire cesser définitivement de se livrer à la prostitution peut requérir de l’autorité administrative sa radiation du fichier. La radiation est alorsCelle-ci est prononcée si sa déclaration est reconnue sincère. Elle cesse alors d’être soumise aux obligations prévues à l’article 1er’’. Tout demandeur remplissant les conditions requises par la loi peut et dont le nom n’a pas été radié du fichier, est alors invité à ‘’saisir le juge aux fins d'obtenir de l'administration sa radiation si la saisine de l'administration est restée sans suite». Mais les traces ne disparaissent pas pour autant.

Son confrère, Me Assane Dioma Ndiaye, n’a pas été laissé en rade. Pprésident de Ligue sénégalaise des droits de l’homme (Lsdh) il trouve querenchérit : «Lla demande de radiation complète du fichier , est une revendication légitime. Oui, parce que c’est des pratiques. On peut s’adonner temporairement à la prostitution, comme on peut en faire évidemment un métier éternel toute sa vie. C’est peut-être par nécessité que la personne est amenée à pratiquer la prostitution. Mais dès lors qu’elle ne s’adonne plus à la prostitution,au’on accepte de tourner la page, il n’y a plus de raison à ce que son nom reste sur le fichier. Aujourd’hui, il est aberrant que pour une simple question de contrôle, même s’il s’agit d’une question de santé publique, qu’on puisse créer un fichier où sont stockées ldes données personnelles s’agissant de ceux qui s’adonnent à la prostitution.n’’. O

L’avocat dit penser qu’’on doit aller vers une flexibilité de cette loi qui permettra, tout en qui assureant à ceux qui s’adonnent à la prostitution, de pouvoir s’astreindre à ces visites régulières mais tout en protégeant leurs vies privées ets. Et en préservant autant que possible la confidentialité qui peut s’attacher à des données personnelles qui peuvent être recueillies dans ce cadre.

Me Ndiaye trouve même que cela peut promouvoir la pratique clandestine de la prostitution. ‘’Bien entendu, à partir du moment où la personne qui fait cette déclaration et qui s’inscrit au niveau du fichier a le sentiment qu’elle ne pourra jamais se délier de ces mentions écrites, évidemment elle aura tendance à éviter de s’inscrire tout en s’adonnant à la prostitution. Si vous mettez trop de contraintes, trop de lourdeurs, à une obligation, vous créez les portes d’un contournement de cette exigence ou de cette obligation.  Et c’est cela le danger».

Youssoupha MINE